Le manager du Grenoble Foot 38 Max Marty nous a accordé, il y a quelques jours, un long entretien. L’occasion pour lui de dresser un bilan (sportif, financier…) de la première partie de saison et d’aborder le mercato du GF38.

Mi-parcours : le GF38 dans les clous ?

On avait l’impression avec le staff, les dirigeants, le président, qu’on avait une équipe pour être aux alentours de la 10ème place. Pour l’instant, on a fait un peu mieux. C’est très volatile. Aujourd’hui ce n’est pas gravé dans le marbre. On est promu, on le voit, on est en souffrance depuis quelques matchs en championnat.
On ne vole pas notre classement mais il faut rester prudent. C’est une génération de joueurs qui se connaît très bien. On a 6,7,8 joueurs qui étaient titulaires en CFA. C’est un vrai plaisir pour nous et une vraie reconnaissance de leur travail. Maintenant on est tout de même condamné lors des mercato à rajouter un peu d’expérience, de qualité, qui leur permettent à eux aussi de progresser.

Globalement on est satisfait. On sait qu’on a les petits éléments de réussite pour faire partie de la première moitié du classement. On va essayer d’y rester. On sait que quand on est à Grenoble en N3 ou en L1 il faut être performant. Les gens veulent nous voir gagner. Ce n’est pas parce qu’on est en L2 qu’on a le droit d’être 15ème. Les Grenoblois ne se voient pas comme une équipe de Ligue 2 moyenne. On est condamnés à être performants.

Cette exigence n’est pas un frein mais nous rappelle en permanence qu’il ne faut pas qu’on s’endorme.

Des attentes trop élevées pour le promu ?

Quand on est manager, il peut y avoir des jours où on est un peu fatigué, où on se dit qu’il faut procéder par étape, qu’il faut prendre le temps de se structurer. Mais c’est eux (les supporters, ndlr) qui ont raison. Le foot ça demande une exigence totale, on doit rester des compétiteurs. Qu’ils soient dans un degré d’exigence fort, le club l’accepte. On est là pour regarder ce qu’on doit faire demain, pas pour contempler ce qu’on a accompli. Eux nous obligent à ça et c’est une très bonne chose. On ne peut pas s’endormir.

Le spectacle au rendez-vous ?

On est sur la bonne voie. On est dans une logique où on doit refaire plaisir après des saisons où le résultat prévalait sur le reste. Ça marche au niveau de nos partenaires, c’est encore compliqué pour les supporters et on est déçu sur l’affluence mais ce n’est pas lié à la qualité du jeu.
Notre staff remplit l’objectif, on a changé quelques joueurs mais on joue aussi différemment. Notre équipe a progressé, on se sent plus en sécurité. Je trouve qu’on joue mieux, qu’on est plus attractif et, tôt ou tard, ça se traduira aussi par plus d’engouement même si les Grenoblois veulent du haut niveau.

L’affluence en attente d’un événement fédérateur ?

D’abord il faut rappeler qu’il y a une baisse globale des spectateurs dans le foot en L2. Il y a tellement de matchs à la télé… Après il faut être supporter de son club, ce n’est pas si simple. Néanmoins, on est la 5ème affluence de L2, ce qui est très correct. Maintenant on ne veut pas se contenter de ça. Le foot c’est une histoire d’aventure humaine, de passion. La coupe est là pour ça. Cela fait longtemps que nous n’avons pas créé d’exploit, depuis Marseille. On a besoin de battre une équipe plus forte que nous (interview réalisée avant Strasbourg, ndlr).
A côté de ça on doit continuer à travailler. Sur la tribune famille, sur la qualité de l’accueil…. On est le seul sport collectif qui pratique la palpation, on sait que ça prend du temps, il faut que notre public anticipe aussi ce sujet. Il faut qu’on se ré-habitue à revenir un peu avant au stade. Il faut que venir au stade soit une joie, une fête, on y travaille pour grappiller des spectateurs à droite et à gauche. C’est un sujet important de travail au sein du club. On va d’ailleurs emmener de la nouveauté dans les mois qui viennent.

Les finances au beau fixe

On est le seul club de Ligue 2 à être monté sans encadrement de la masse salariale si je ne me trompe pas, ce n’est pas anodin. Notre président définit un cadre, des budgets, des objectifs et j’essaie qu’on ne dépasse pas ce qui a été donné et que ça satisfasse les différents services. C’est un jeu de construction.
On a la chance aujourd’hui de ne pas être construit sur pilotis, Stéphane Rosnoblet donne de la lisibilité au projet.

Je suis assez surpris parce qu’au niveau partenariat on est souvent à guichets fermés dans nos salons, on sert régulièrement plus de 500 repas. On a rattrapé plus vite au niveau du secteur partenariat que pour le grand public. Les patrons locaux ont compris que le foot peut être attractif, et qu’il est un atout pour le territoire, au même titre que FCG ou les BDL. Aujourd’hui on est très satisfait du retour du monde entrepreneurial local.

Philippe Hinschberger, l’homme de la situation

Il ne faut jamais brûler ce qu’on a aimé et toujours respecter ce qui a été fait avant. Mais Philippe nous apporte une touche supplémentaire de sérieux. On a la chance d’avoir gardé Arnaud Genty et Micka Diaferia pour faire le liant avec l’arrivée de Francis et Philippe qui amènent un professionnalisme supplémentaire.
C’est quelqu’un d’exemplaire, qui a toujours travaillé, qui n’a jamais rien revendiqué… Il a l’humilité nécessaire malgré ses certitudes d’entraîneur. Oui aujourd’hui Philippe est un élément du puzzle du club très important.

Le mercato : échecs, réussites et perspectives

C’est difficile de juger son travail. Je sais que Mombris est une réussite, que M’Changama est une réussite etc. Mais je ne regarde que ce qui ne va pas.

J’attends plus de Jiga car c’est un international. Le coach se pose la question de le voir bouger car c’est aussi ennuyeux pour lui, avec son statut d’international, de ne pas jouer.

Est-ce qu’on peut être patient aujourd’hui dans le football ? Si c’était un jeune français de 22-23 ans on serait patient mais quand on est international étranger, on attend autre chose, une plus-value, des buts, des passes décisives. Ce statut d’international étranger lui donne moins de temps. Il en est conscient. Sa qualité n’est pas remise en cause, son exemplarité son professionnalisme non plus, le coach en parle tout le temps. C’est son rendement dans notre effectif qui n’est pas encore satisfaisant. Est ce qu’on va attendre un peu ? C’est un sujet dont on parle. Un prêt, un départ ? Tout dépend ce que veulent les clubs, de ce que lui veut. Moi je suis plutôt dans une logique de le voir jouer et de la récupérer, après il y a la question de l’adaptabilité en Ligue 2. Est ce que ce n’est pas un joueur qui sera plus à l’aise sous l’attaquant que sur un côté également ? Ce ne serait alors pas ce que l’on veut et un départ serait la chose à faire dans ce cas là. Ce sont tous les éléments qu’il faut prendre en compte pour la suite et c’est quelque chose auquel on réfléchit .

On va chercher pour lui et d’autres la meilleure solution. Le mercato d’hiver doit nous permettre de rééquilibrer ce groupe qui a fini sur les rotules à Noël.

Les prêts de David et Dieng

Ils sont tous les deux titulaires dans une équipe qui performe. Ils sont dans les tableaux pour l’an prochain dans mon effectif. Ce sont des garçons qui n’ont pas vu ça comme une punition, ils se sont mis au boulot. Le coach et le président de Rodez me font souvent de bons retours.

Le partenariat avec le RAF ? S’ils montent en L2 ce sera plus compliqué de leur prêter des joueurs (rires). Mais en attendant de connaître leur futur on a jeté les bases de ce partenariat car c’est important pour nous d’avoir un bon club de National, un peu à la campagne, avec des gens honnêtes à sa tête, avec qui on peut travailler.

La situation de Boussaha

Un joueur qui ne joue pas, c’est une situation compliquée pour nous et pour lui. Si Lakdar veut rester chez nous il a un contrat. C’est un très bon joueur, pas en réussite chez nous mais on ne marque pas deux fois plus de 10 buts en Ligue 2 par hasard. S’il décide de partir, on saura l’accompagner mais la balle est clairement dans son camp.

« Je suis un réducteur d’incertitudes »

Un nouvel attaquant cet hiver ?

On a fait 3 joueurs, ce qui est beaucoup, 3 joueurs différents. Yohan Brun est dans la veine de nos joueurs à nous, qui a ce supplément d’âme, cette envie d’y arriver et une grosse marge de progression. Romain Grange est un frappeur de coups de pied arrêtés de très haut niveau, toujours dans les meilleurs joueurs de L2 dans les clubs où il est passé et qui jouait moins en Belgique parce que son entraîneur préférait un profil différent. Sur ce cas là tout le monde a fait beaucoup d’efforts car il avait un gros contrat. Il doit nous apporter une plus-value technique. Yves Simon Pambou est un jeune joueur formé à Nantes, qui a passé 3ans en Slovaquie où il était titulaire, qui n’a pas pu signer où il voulait l’été dernier et qui a donc signé 6 mois en Israël. Il a un gros volume, une grosse vma, avec lui on veut surtout voir ce que ça va donner pour l’an prochain.

Un nouvel attaquant ? Déjà on est très content de Flo Sotoca dans l’axe donc si on prends un attaquant dans cette zone de jeu, cela veut dire qu’on déplace Flo et je ne suis pas sûr que le coach ait envie de lui dire d’aller jouer sur un côté. L’attaquant on l’a voulu sous Flo, dans un registre différent et c’est plutôt Romain Grange. Après on ne s’interdit rien, le mercato n’est pas fini. Nicolas Taravel devrait nous quitter, Lakdar est une possibilité de départ également, on espère ne pas avoir d’offre pour nos 1-2 joueurs dont les noms circulent à droite et à gauche également.

On ne s’interdit pas une 4ème recrue mais ce n’est pas notre objectif aujourd’hui. Je pense qu’avec l’effectif actuel on peut être un peu plus performant que lors de la première partie de saison.

L’évolution du métier de « recruteur »

Il y a une énorme différence avec quelques années en arrière. Maintenant il y a des images, internet, soccerway… Ceux qui veulent travailler savent tout. Avant il fallait se bouger les fesses, partir en expédition. Ce n’est pas le même métier.
Cette saison on a vu l’arrivée à Grenoble de Laurent Dechaux qui nous fait des pré-tris sur les sujets, on a un scout qui travaille pour nous, qui a été voir jouer Brun à plusieurs reprises. C’est un travail différent, et encore plus difficile en hiver car souvent cela concerne des joueurs qui jouent moins ou des joueurs qui viennent de dessous, de loin… Là on a réuni tous les cas de figure (rires) ! Il y a des risques, on essaie de les minimiser. C’est mon job : je suis un réducteur d’incertitudes. Après ce qu’il faut c’est se tromper moins que les autres, ne pas se tromper c’est impossible. Si c’est moi qui faisais les règles il n’y aurait pas de marché d’hiver. Maintenant on fait avec et il a de l’utilité pour des joueurs qui jouent moins.

Depuis la fin de l’année on est d’ailleurs plutôt sur celui de l’été qui vient, on construit l’équipe de l’année prochaine, je suis déjà dans l’anticipation. Sur le marché d’été on a du temps, des solutions à tous les postes. Il y a toujours ce besoin d’anticiper, toujours avoir un coup d’avance. On sait que si un tel part on a une liste de joueurs derrière. Après il y a une réalité économique, on doit être 17ème masse salariale de L2, on fait l’équipe qu’on peut mais on est très content d’avoir fait cette équipe là.

Des fins de contrat à gérer

Aujourd’hui on a deux joueurs qui jouent régulièrement qui sont en fin de contrat : Maxime Spano Rahou et Malek Chergui. Soit ils auront grandi avec le club et ce qu’ils nous demandent on ne pourra pas le faire et à ce moment là on sera content qu’ils aillent ailleurs. Soit on pourra les conserver, et c’est notre envie, mais dans notre grille de rémunération. Le fait qu’ils arrivent en fin de contrat ne veut pas dire qu’on ne va pas trouver une solution.

Un degré d’exigence supérieur au GF38 ?

J’ai toujours attendu de l’exigence, je suis de temps en temps quelqu’un d’assez désagréable sur l’exigence. Il y a des règles. Ici certaines règles sont plus importantes que dans d’autres clubs de foot, ça c’est aussi dû à la personnalité du président, pour qui il est par exemple important qu’on soit en tête du classement du fair-play. L’exemple vient du terrain. Il faut qu’on continue à partir à la bonne date, à prendre 5 semaines de congés payés et pas 6, quand on a un rendez-vous on est présent…. Dans le foot on pense parfois pouvoir s’en accommoder parce qu’on se pense indispensable. Je suis très attentif aux règles et très heureux qu’ici on me permette de les faire appliquer.

A Grenoble les règles sont respectées, même quand ça nous coûte, même quand cela ne fait pas plaisir humainement, même quand cela nous joue des tours sportivement.

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